HIVA OA – 7 > 12 mai 2013
Après trois semaines d’horizon rectiligne, les reliefs d’Hiva Oa nous plaisent tout de suite.
Nous louons deux petits 4x4 avec Cerise et Jo et partons en excursion à travers l’île. Une longue balade secouée nous amène dans les hauteurs.
Nous passons de la forêt fraiche et dense au littoral, aux découpes spectaculaires, plongeant dans des eaux profondes.
Peu de plages de sable blanc mais de nombreuses criques bordées de pierres volcaniques.
Le vert des massifs montagneux s’oppose au rouge de la terre.
Le plateau central d’Hiva Oa est recouvert d’une végétation inextricable. C’est au cœur de cette jungle que nous découvrons ensuite l’un des plus précieux sites archéologiques des Marquises, le Me’ae Iiopona.
Le Me’ae était considéré comme l’espace sacré par excellence. Il était toujours « tapu », c’est-à-dire interdit ou réservé (surtout pendant le temps des rituels) à des personnes dont le mana* était très important. Les tiki sculptés dans la pierre volcanique qui se dressaient sur ces lieux, étaient sacrées au plus haut point et représentaient des personnalités prestigieuses qui avaient été élevées au rang d’ancêtres déifiés. On y rencontre, entre autres, Takaii, chef et grand guerrier réputé pour sa force. Haut de 2m35, il est le plus grand des tiki de Polynésie.
*Mana : Il s’agit d’un des plus importants concepts de la philosophie religieuse polynésienne. Toutes les subtilités de son application rendent sa traduction très difficile. Le mana était l’essence éminemment mouvante qui permettait au monde d’exister. La quantité de mana reçue à la naissance dépendait de l’acquis cumulé par les ancêtres. Ce mana assurait aux familles d’artisans-experts, de chefs, de prêtres et de guerriers, une suprématie réelle. Un chef important, possédant beaucoup de mana assurait, par cette force « vivifiante » qui émanait de lui, l’abondance des récoltes, le bien-être de son clan. Le mana d’un grand guerrier lui permettait de réaliser des actes prodigieux.
La nature est resplendissante. Nous rencontrons des chevaux à chaque virage, dont un apprécie particulièrement le goût de notre pare-brise. Nous nous arrêtons pour ramasser mangues et citrons verts. Au passage d’Atuona, l’unique village de la baie de Taaoa, nous tentons de faire des emplettes dont nous reviendrons quelque-peu bredouilles : quasiment pas de produit frais, pas de fruit, pas de légume et pour le reste, un produit sur deux est périmé. De surcroit, un jeune marquisien nous prévient que le congel du magasin est éteint la nuit… Et tout ça pour un prix exorbitant ! Bon ben, on va s’débrouiller avec ce qu’on a.
Nous ne manquons pas d’aller rendre « visite » à deux artistes, français et belge, qui avaient choisi Hiva Oa pour leurs dernières années de vie. Dominant la baie, le petit cimetière d’Atuona abrite la tombe de Paul Gauguin, sous un frangipanier, gardée par sa sculpture de la déesse Oviri (divinité tahitienne dont le nom signifie « sauvage »). Le peintre résida de 1901 à 1903 sur l’île où il réalisa quelques-unes de ses plus belles toiles, empruntes d’une liberté devenue obsédante.
A quelques pas de là, celle d’un grand artiste en mal de tranquillité : Jacques Brel. Il vécut 3 ans dans ce petit village avant de s’éteindre en 1978. Lui qui chantait « …le temps s’immobilise, aux Marquises ».
Coté ancrage, quelques péripéties ont ponctué notre séjour à Hiva Oa. Tout au fond de la baie de Taaoa, bien à l’abri. Nous avions mis 2 ancres (avant / arrière), comme tous les bateaux au mouillage l’avaient fait afin d’éviter* de la même manière qu’eux. D’abord, il nous a fallu repositionner plusieurs fois l’ancre arrière qui n’accrochait pas. Puis, de retour d’une balade, nous avons retrouvé des gens tirant sur notre ancre arrière afin de décaler Coco d’îles qui était venu effleurer un autre bateau. Leur action a déplacé cette ancre dans un grillage qui gisait au fond. Sans le savoir, l’ancre avant était également coincée dans ce même grillage. Résultat : il nous a été impossible de remonter aucune ancre. Marc a dû plonger pour déloger de son piège et replacer l’ancre arrière pour la nuit (dans une eau complètement opaque, sachant qu’il y avait des requins… Le danger, c’est justement quand ils voient mal… faudrait pas qu’il le prenne pour une otarie !). Le lendemain, plusieurs tentatives nous ont permis de décrocher l’ancre avant, en tournant autour de la chaine et en la tirant en arrière. Nous avons alors remouillé Coco d’îles un peu plus loin et face au vent. Face à cette situation, nos escapades ont plusieurs fois été remises à plus tard et même quand on partait, ce n’était pas sans craindre un carambolage dans la baie… Mais on n’était pas au bout de nos surprises ! En partant, le dernier jour, l’ancre arrière tenait tellement bien qu’on ne pouvait plus la remonter non plus… Elle était entièrement prise dans la vase. Une autre petite plongée pour Marc qui a dû la dégager à la main.
*Eviter (pour un bateau) : tourner autour de son ancre sous l’action des changements de direction du vent.